Jour des Morts : la provocation de l’ADMD

La dernière lubie de l’ADMD, l’association pour le droit à mourir dans la dignité – qu’on pourrait rebaptiser l’association pour le droit au laisser mourir ou au suicide assisté? Faire du 2 novembre, jour où traditionnellement, on célèbre nos morts,  une journée mondiale pour la légalisation de l’euthanasie. Stupéfiant!

Comme l’alliance pour les droits de la vie (ADV) le fait remarquer, on peut parler de cette démarche non seulement comme une provocation – l’association en est habituée, elle qui ne fonctionne que par la stratégie du coup médiatique – mais de façon plus forte, comme d’une quasi-profanation. Quand on en est arrivé à ce niveau, c’est peut-être qu’on n’a plus d’arguments : s’il faut être dans le trash pour faire parler de soi et véhiculer son message, c’est très triste.

Le 2 novembre, dans la tradition catholique, et donc fatalement, nationale, c’est une date où on se recueille, où on essaie tant bien que mal d’honorer ses morts, et Dieu sait si pour beaucoup de gens, il s’agit d’une journée difficile à vivre. Comme dit l’ADV, ce n’est sûrement pas le bon moment pour introduire la « revendication » et le « ressentiment ». Voire la polémique. Surtout sur un sujet aussi délicat, sur lequel on a du mal à discuter sereinement, et qui nécessite une réflexion qui sorte un peu du manichéisme auquel nous a habitués l’association présidée par Jean-Luc Romero.

A l’instar de Jean Leonetti, dont la mission approche de son terme (ce qui peut expliquer la colère de l’ADMD), je pense que « le « prendre soin » est la véritable attitude de modernité ». Et que l’urgence, aujourd’hui, est de développer les soins palliatifs. Il s’agit d’une solution d’espoir, contrairement à l’euthanasie, qui est un aveu d’échec consistant à dire ou penser que la mort est la seule solution face à la souffrance. A-t-on, franchement, tout tenté à ce niveau? J’en doute.

Jean Leonetti effectue d’ailleurs une séparation nette (contrairement à l’ADMD qui introduit volontairement la confusion entre les deux notions) entre les malades en fin de vie, qui n’ont plus d’espoir et dont les jours sont comptés, et les malades incurables dont la mort n’est pas d’actualité. Dans la première hypothèse, dit-il, la fameuse loi du 22 avril 2005 « répond à quasiment toutes les situations ». Dans la seconde, « la personne peut se suicider, c’est un « droit liberté », mais pas un « droit créance » vis-à-vis de la société. En d’autres termes, la société n’a pas à assumer ce geste pour elle ».

Dominique Quinio, éditorialiste à La Croix, résume très bien au final l’alternative qui s’offre à nous, et qu’il ne faut pas perdre de vue dans ce débat : « Veut-on une société individualiste où chacun disposerait d’un droit à tout maîtriser de la vie, de la naissance à la mort et où le devoir de la collectivité serait de leur permettre d’exercer cette succession de droits ? Ou bien veut-on une société solidaire où la communauté humaine se donne pour mission d’accompagner, de soutenir, de soigner les plus faibles, avec le souci de leur dignité et de leur bien-être, sans croire, ou surtout sans leur laisser croire, que la seule solution serait la mort ? »

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11 Commentaires

Classé dans Société

11 réponses à “Jour des Morts : la provocation de l’ADMD

  1. Yogi

    Intéressante conclusion. Vu comme ça en effet c’est assez clair : personnellement, l’idée que « la communauté humaine » puisse « se donner pour mission » de « m’accompagner, me soutenir et me soigner » en cas de faiblesse, me révulse absolument.

    Non mais de quoi je me mêle ? Qu’elle me donne le choix, point barre.

  2. J’imagine que vous êtes assez intelligent(e) pour comprendre que vous avez besoin de l’accord de la société pour cela, et que celle-ci, justement, a le droit de vous dire non, dans la mesure où « ouvrir la voie au libre choix » peut se retourner contre les plus faibles.

  3. Yogi

    L’argument est-il qu’il faut interdire à tous ce qui peut potentiellement se retourner contre quelques uns ?
    Interdisez le sucre, qui pourrait nuire aux diabétiques, interdisez la cortisone qui provoque des allergies, etc …

  4. le chafouin

    On ne parle pas de sucre, là, vous l’aurez remarqué. On parle de vies humaines. Alors oui, si pour éviter qu’on en vienne à assassiner des vieux, je dois vous empêcher d’assouvir votre volonté d’en finir, alors oui, la société doit le faire. Il vaut mieux maintenir en vie qq’un contre son gré que de faire mourir quelqu’un qui ne le veut pas.

  5. Yogi

    Il n’a jamais été question de faire mourir quelqu’un qui ne le veut pas. Vous vous appuyez sur cette menace fantasmatique pour imposer à tous votre vision du monde et votre conception de la vie. Cet autoritarisme est scandaleux.

  6. Yogi

    Il n’a jamais été question de faire mourir quelqu’un qui ne le veut pas. Vous vous appuyez sur cette menace fantasmatique pour imposer à tous votre vision du monde et votre conception de la vie. Cet autoritarisme est scandaleux.

  7. le chafouin

    http://afp.google.com/article/ALeqM5gP4VkDxtLiydQZGlw8umcFgIwjvQ

    Pfff. 200 personnes ont manifesté avec l’ADMD à Paris. Et ils espèrent nous faire croire que leur projet est fédérateur? 😉

  8. Yogi

    N’importe quelle loi peut dériver dans n’importe quel sens, ce n’est pas pour autant qu’il faut arrêter de légiférer.
    La question est « chacun peut-il choisir sa propre vie ? » et selon moi la réponse est oui. Dans les exemples que vous donnez, la réponse est non. Dans l’interdiction de l’euthanasie que vous prônez, la réponse est également non.

  9. le chafouin

    Entre nous, pensez-vous que si demain, vous souhaitiez vous supprimer, on irait vous empêcher de le faire? En quoi a-t-on besoin d’une reconaissance publique du fait que vous ayiez le droit de le faire? ça vous soulagerait de ne pas vous sentir en-dehors des « clous »? (je n’ironise pas, je cherche à comprendre).

    Certes, cela permettrait de ne pas laisser vivre quelqu’un qui ne veut plus de la vie. Mais d’une part, notez que sur ce point, cela ne concerne pas que la fin de vie.

    Et d’autre part, je préfère qu’un vivant qui souhaite mourir ne le puisse éventuellement pas, plutôt que l’inverse.

    Tout est question de bilan coût-avantage. Mais je me félicite que vous agréiez aux exemples que je cite.

  10. Je pense qu’il s’agit surtout de la pensée de notre époque: j’ai envie donc je le fais! J’ai envie de mourir, je fais mon testament (soit dit en passant ce testament est souvent fait largement avant que la personne tombe dans le Coma ou aie une maladie…)pour autoriser le médecin a m’injecter telle ou telle substance…(dans le monde des animaux – qui n’est pas tout blanc je l’avoue – le meurtre est parfois utilisé mais avez vous déja vu un animal se suicider????)
    Nous avons une journée des Morts, et à la place on voudrait mettre une journée des suicidés !!! C’est comme ceci que je vois la chose!!! Pour moi, c’est une porte de sortie que je trouve peut être pas lâche mais pas très honorable…

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