Archives mensuelles : décembre 2011

Petit bilan (subjectif) du mandat de Nicolas Sarkozy

Pour ceux qui ne l’ont pas vu, il n’est pas trop tard : regardez cet excellent documentaire de William Karel, diffusé le 21 décembre dernier sur Arte et qu’on peut encore retrouver sur Youtube. Looking for Nicolas Sarkozy est une rétrospective du bilan de Nicolas Sarkozy, à travers le regard de 18 correspondants de médias étrangers installés à Paris. Ils sont interrogés très sobrement, face à la caméra, et leurs propos sont entrecoupés d’images d’archives retraçant cinq années de pouvoir sarkozyste. Lire la suite

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Les stagiaires permanents

Oui, je sais, ça fait bien longtemps que je n’ai pas sévi ici. Des lustres, un bail, une paie. Je cherchais un prétexte pour ranimer la flamme. J’attendais le bon moment. Et puis, tout à coup, ce matin, je tombe sur ce tweet d’un rédacteur en chef adjoint de Marianne2.fr, qui sous twitter, gazouille sous le doux  nom de @mmdp.

Je n’ai aucun a priori défavorable à Marianne, si ce n’est ce ton d’éternels donneurs de leçons qui a tendance à m’agacer prodigieusement. D’autant que sa rédaction ne s’applique pas toujours les principes qu’elle exige des autres, notamment en matière de bonne foi et d’éthique journalistique Donc en fait, si, j’ai un a priori contre Marianne. Mais ce n’est pas cet a priori ni ce journal qui sont ici en cause.

Ce qui est en cause, c’est la pratique illustrée par ce tweet. Pratique qui n’est absolument pas propre à Marianne, et qui constitue sans nul doute une dérive du stage, et qui existe dans tous les secteurs : alors qu’il devait être, qu’il doit être, et qu’il devrait être un outil de formation du jeune diplômé, au bénéfice de l’intérêt général et pourquoi pas de la société qui l’emploie, le stage est tout bonnement devenu un mode de gestion des ressources humaines permettant d’économiser des postes de CDD et de CDI. Au prétexte du « test » qu’il représente, et de la « formation » qu’il octroie à celui qui en bénéficie.

Après avoir engagé le dialogue – pas très constructif, puisque quand on conteste le fonctionnement d’une boîte, on se retrouve vite accusé de troller, voire pire, de militer! – avec @mmdp et @geraldandrieu, un journaliste de Marianne lui-même passé par la voie du stage avant d’être embauché (mérite qu’il faut reconnaître au stage), on apprend que comme dans beaucoup d’entreprises, Marianne emploie des stagiaires permanents, dont le nombre serait limité à trois sur un effectif de 100 personnes.

Où est le problème? Pour notre ami MMDP, le sujet est un faux débat, car cette pratique permet de former les jeunes diplômés : à 25 ans, quand on sort d’école, « on ne sait rien faire » selon lui. Et du coup, le stage serait devenu une « étape » du parcours professionnel. Sous-entendu : une étape incontournable. Sous-entendu aussi : les deux parties y gagnent. Le stagiaire obtient une « expérience » utile sur son CV. L’entreprise augmente sa production en minimisant les frais.

C’est une réalité : ces trois postes permanents de stagiaires permettent à Marianne d’économiser le bagatelle de trois salaires, que le journal va remplacer par des « indemnisations », obligatoires pour un stage de plus de deux mois. Reconnaissons à Marianne le mérite de limiter la durée du stage à trois mois, là où certaines entreprises n’hésitent pas à aller jusqu’à six mois, voire un an. Bon, enfin on n’aura pas su le montant de cette indemnisation, malgré notre insistance.

De mon côté, quand j’ai démarré mon parcours de journaliste (carrière, ça fait bizarre) en presse écrite, j’ai démarré par un stage de cinq mois au total, au cours duquel je faisais le même boulot que tout le monde. Au cours duquel je travaillais plus que nombre de « vieux de la vieille », qui rentraient chez eux à 18h30 pendant que je terminais le « dossier du jour » du lendemain. Des « vieux » qui ne s’étaient pas remis en cause depuis vingt ans, qui n’avaient jamais pensé à renouveler leur façon de travailler, des vieux qui n’avaient plus d’idées, qui n’avaient guère d’enthousiasme, et qui avaient perdu toute audace. Mais qui, bien entendu, gagnaient de forts beaux salaires, pendant que je touchais mon indemnité de 350 ou 400€.

Je n’ai pas été malheureux. J’ai été content qu’on me mette le pied à l’étrier. Qu’on m’entoure de conseils. Et qu’en effet, on prolonge ma formation en lui donnant une coloration « pratique ». Même si, pour tout dire, les écoles prévoient déjà des stages obligatoires durant la scolarité et pendant l’été séparant les deux années de formation.

Mais ce genre d’expérience donne l’impression qu’on table beaucoup sur les stagiaires pour boucher les trous, qu’on exploite la soif de terrain des jeunes diplômés. Leur consentement? La belle affaire! On peut toujours dire que les jeunes sont libres de refuser, de chercher plutôt un CDD. Mais comme le dit @mmdp lui-même, le stage est devenu un incontournable dans la pratique des DRH. Le « jeune » n’a donc tout bonnement pas le choix. Et on voit des personnes hautement diplômées être contraintes de chercher non pas un emploi mais un … vulgaire stage.

Nos parents n’avaient qu’à se pencher pour trouver un CDI. Ils pouvaient en refuser. Nous, on cherche des stages. Et le pire, c’est qu’on est content d’en trouver un.

Et qu’on ne dise pas qu’il n’y a pas de boulot : il y a du boulot, puisqu’on en confie à des stagiaires. Il y a du boulot, puisque Marianne « cherche » un stagiaire pour janvier-février. Cela veut bien dire qu’elle en a besoin.

La vérité, c’est que si un besoin existe, tous ces stagiaires devraient donc être recrutés en CDD.

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