La journée des antisarkozystes primaires

Comme la fois précédente, hors de question pour moi de participer à la journée national des mécontents, opportunément rebaptisée No Sarkozy Day. Cette initiative, qui provient d’on ne sait où (tiens tiens…), vise à rassembler un maximum de gens dans les rues, le 27 mars prochain, pour dénoncer la politique de Nicolas Sarkozy et réclamer avec fracas sa démission. Elle vise aussi à créer, grâce à Facebook, un réseau qui pourrait ensuite être réexploité politiquement. Une telle action totalement illisible a tellement peu de sens que la plupart des « gros blogs de gauche » ont refusé de s’y joindre.

Ils avaient espéré rallier la blogosphère de gauche à leur journée pompeusement copiée sur le « no berlusconi day », qui avait rassemblée une foule énorme dans les rues de Rome en réponse à un appel lancé sur internet. Manque de bol, le flop n’est pas loin : les blogs de gauche parmi les plus importants ont annoncé qu’ils ne participeraient pas à cette manifestation, et ne la soutiendraient même pas.

Une tribune commune a même été publiée par Marianne2.fr – qui n’est pas à une incohérence près, puisque le texte appelle à dépasser l’antisarkozysme primaire… –  à laquelle se sont joints quelques blogueurs centristes et gaullistes. On sent que ce texte est le fruit d’un compromis et d’âpres discussions entre les différents signataires. J’aurais pu la signer des deux mains. Au final, seuls des marginaux, des illuminés ou des extrémistes ont répondu à l’appel de No Sarkozy Day. Et accusent désormais les premiers d’être des sociaux-traîtres.

Nous sommes nombreux à ne pas aimer Nicolas Sarkozy, mais surtout, à ne pas apprécier l’action qu’il mène. Trop nombreux, même. On a tous une bonne raison pour ça. On sent même de plus en plus que c’est une mode. Sarkozy? Pouah. Quelle serait donc la leçon politique d’une telle journée, une fois que le marin-pêcheur aurait défilé aux côtés du professeur d’histoire-géo, du chercheur, du cégétiste, du gaulliste, du démocrate-chrétien ou de l’ouvrier désabusé? Il n’y en aurait aucune. Hormis le fait de se faire plaisir à peu de frais et de s’enorgueillir de cette meeeeeeeerveilleuse action rendue possible grâce à l’Internet, s’il vous plaît.

Nicolas Sarkozy m’agace, je désapprouve son empressement, son agitation, son manque de tenue et sa politique basée sur les sondages d’opinion, ses revirements permanents et son obsession du chiffre. Surtout, dans les domaines qui m’intéressent particulièrement, tels que la sécurité et la justice, cette politique à vue, sans horizon, basée sur un seul objectif comptable, m’insupporte au plus haut point. On nous avait promis une politique de civilisation, mais on attend toujours. Mais il n’est pas imaginable de vouloir faire table rase d’une politique, sans savoir ce qu’on va installer à la place.

Et puis, Nicolas Sarkozy a été élu, et doit aller jusqu’au bout de son mandat. Qui sont ces olibrius qui osent croire que l’exécutif peut être à la merci de poke et de groupes Facebook dont les membres ne sont même pas toujours au courant qu’ils le sont? Ceux qui sont mécontents auront les régionales pour s’exprimer. Qu’ils se bougent, plutôt que de se donner bonne conscience à s’inscrire sur des groupes Facebook!

Sans compter, comme le rappelle judicieusement Authueil, que nul ne sait qui se cache derrière les organisateurs de ce No Sarkozy Day. Ils tentent de se faire passer pour de « simples citoyens et militants opposés à la politique du gouvernement Sarkozy », mais qui y croit? Quel « simple citoyen » indépendant de tout parti ou organisation créerait un site internet et aurait les réseaux suffisants pour tenter une telle démarche? Dans ces conditions de flou, peut-on raisonnablement défiler sans savoir qui va engranger les fruits de la marche? Pour citer une nouvelle fois Authueil, « les idiots utiles existeront toujours et les extrêmes ont toujours été très forts pour les utiliser ».

Cela me semble être une très bonne conclusion.

P.S : bonne année à tous!

19 Commentaires

Classé dans Politique

19 réponses à “La journée des antisarkozystes primaires

  1. Théa

    Bonne année à toi aussi !

    Moi non plus je n’approuve pas toujours la politique de Nicolas Sarkozy qui a souvent tendance, selon moi, à trop vouloir ménager à la fois la chèvre, le choux et même le loup.
    Je n’approuve pas certaines de ses initiatives politiques ni son omniprésence sur la scène politique qui m’agace un peu. Je n’aime pas toujours son attitude sur la scène politique.

    Cependant, je ne peux pas nier qu’il a au moins essayé de tenir le maximum de ses promesses électorales et que lui, contrairement à ses adversaires politiques, propose un programme précis et qu’il s’efforce de tenir.

    On peut critiquer un programme politique: il y aura toujours des points contestables : je n’en connais aucun pour le moment avec lequel je suis totalement d’accord. Mais Nicolas Sarkozy a fait au moins l’effort d’en établir un et de tenter de le respecter.
    Ce genre d’initiative de la part de ces militants anti-Sarkozy ne recevra que mon mépris: Ces gens critiquent pour critiquer, ce qui me semble absurde.
    S’ils faisaient l’effort de proposer autre chose, d’oser véritablement pour proposer un autre choix, alors j’écouterais leurs propositions. Mais en ce qui concerne leurs critiques non constructives, je ferai la sourde oreille.

    Selon moi, il faut plus de courage pour proposer et construire concrètement, même si on s’expose ainsi à la critique, plutôt que de critiquer, bien à l’abri, le travail des autres.

  2. Bonne année aussi !
    Ce post tombe bien puisque nous publions ce jour une lettre à l’adresse de Nicolas Sarkozy à l’occasion de sa venue mercredi à Cholet…sans trop d’illusion, il faut pas réver !

  3. Si je suis moi-même très réticent face à cette journée, pour diverses raisons, il y a un argument que vous utilisez, Authueil et toi, que je trouve très discutable.

    Je ne vois pas pourquoi on ne pourrait pas faire démissionner un président. L’élection est valide à un instant t, mais ce président peut vite décevoir, voire même devenir dangereux et donc se faire virer. D’ailleurs, la droite a déjà utilisé la manifestation pour menacer un président ou un gouvernement en France.

    Rien ne l’empêcherait ensuite de se représenter pour retrouver une légitimité.

  4. Dès le 28/12, j’exprimai, bien avant certaines « stars » de la blogosphère la bétise du zinzin en question. Rien que la lecture de leur  » manifeste » prêtait à sourire mais certainement pas a entraîner les foules !
    http://corto74.unblog.fr/2009/12/28/le-sarko-day-folie-passagere-246/

    bonne année
    Biz

  5. Je suis vraiment content de cette opération.

    Primo, ça aura permis de faire savoir aux Médias que la blogosphère politique est plus que divisée sur la question de ce No Sarkozy.

    De deux, à part 5 ou 6 blogueurs à la gauche de la gauche, on est quasiment tous d’accord sujet. Et ce genre d’unanimité est assez rare pour être apprécié.

    PS : Bonne année à toi et merci pour ce billet 😉

  6. @Thea

    En l’occurrence de mon côté je ne suis vraiment pas excité par la politique menée par Nicolas Sarkozy, donc qu’il tienne ses promesses ou pas… Tout au moins on peut lui reconnaître de faire ce qu’il a dit, et de dire ce qu’il allait faire. Enfin sur de nombreux sujets, il a donné le sentiment qu’il tenait sa promesse, comme sur le service minimum dans les transports par exemple…

    @cité et culture

    Oui, on n’y croit pas trop! 😉

    @Mathieu L

    La sanction de la politique d’un gouvernement, d’après la constitution, c’est l’élection. Donc il n’y a aucune raison que l’on pose la question de la démission en cours de mandat, sauf scandale énorme. Il faudrait aussi une mobilisation énorme. Or Sarkozy continue d’être populaire et il a un parti électoralement très puissant.

    Et puis en pratique, je ne vois pas qui est aujourd’hui en mesure de battre Sarkozy à une élection. DSK? Il ne peut pas avant 2012 😉

  7. @chafouin :

    Les auteurs de ce texte comptent, pour l’un d’entre eux inscrit sur Twitter au dernier moment, Benjamin Ball. Qui est-ce ? Un des semi-pro du happening médiatico-politique, passé par une bonne douzaine de collectifs citoyens (style jeudi noir ou génération précaire) et sur lequel on trouve nombre d’informations médiatiques (dont un portrait dans l’express ou le nouvel obs, je ne sais plus).

    Une petite mise à jour pourrait s’imposer dans votre billet, vu qu’on connait maintenant au moins un des organisateurs. Qui ne sont pas forcément liés à cette extrême gauche politique qui fait tant peur à Authueil, mais plutôt aux collectifs alter qui ont comme idées d’exploiter les failles médiatiques pour faire changer (sans succès pour le moment, comme pour le droit opposable au logement, une vaste blague) les choses sur des points précis.

  8. @ Chafouin : je suis totalement d’accord avec toi sur l’impasse politique pour la gauche en cas de démission de Sarkozy, mais c’est de la stratégie.

    Fondamentalement, on a parfaitement le droit de réclamer la démission d’un élu, quel qu’il soit, si on estime qu’il est un danger pour notre république. Cette démarche n’a pas à être proscrite. Reste à savoir si Sarkozy la mérite…

  9. @Mathieu L

    On a toujours le droit de réclamer la démission, oui. mais est-on légitime pour autant en le faisant? Je ne sais pas. Ce n’est pas ce que prévoit la constitution.

    J’ai aussi le droit de demander que Federer arrête sa carrière, mais je pense qu’il n’en aura rien à faire 😉

    @Moktarama

    Ecoute j’ai essayé d’en savoir plus mais en effet, à part lui, on ne sait pas trop qui sont les « honnêtes citoyens indépendants » à l’origine du bidule 😉

  10. @ Chafouin : forcément, c’est plus légitime quand nous sommes 20 millions que quand on est tout seul…

  11. @mathieu

    Et forcément, j’admets que si 20 millions de personnes descendent dans la rue pour reclamer la demission de sarkozy, la question pourrait se poser…

  12. Et – tant qu’à faire dans les hypothèses absurdes – si 20.001 millions descendent aussi pour demander qu’il reste, que se passe-t-il ? Gigabaston ?

  13. Pingback: Le No Sarkozy Day, c’est en mai 2012 | Reversus

  14. @h16

    C’est pour ça qu’il vaut mieux s’en tenir à la règle de départ 😉

  15. @ H16 : l’hypothèse que tu décris, en la traitant d’absurde, correspond bien à ce qui s’est passé en mai 1968, lorsque la droite est descendue massivement dans la rue pour soutenir de Gaulle.

    Finalement, le général a fait la seule chose possible : provoquer des élections pour résoudre le problème.

    Dans un cas pareil, Sarkozy ferait la même chose, et je suis sûr qu’il l’emporterait, en plus…

  16. DM

    Pourquoi faudrait-il un réseau pour démarrer un site Web? Vous avez eu besoin d’un réseau pour démarrer votre blog?

  17. @DM

    Euh… Je n’y connaissais rien, j’ai pris une plate-forme déjà préconçue, il n’y a rien à faire, juste des espaces à remplir… Leur site est autrement mieux foutu…

  18. Pingback: No Sarkozy Day : the yes need the no to win against the no… « Pensées d’outre-politique

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